Des slogans très révélateurs
26 août 2022
Avant même le départ officiel, les cinq principaux partis se sont lancés dans la campagne et ont présenté leur slogan. Regardons-les à nouveau, en nous intéressant à certains éléments grammaticaux ou de syntaxe qui sont révélateurs des intentions des formations politiques. Nous les prenons dans l’ordre de la députation de chaque parti à la dissolution de la chambre.
Coalition avenir Québec (CAQ), 76 députés.
Continuons
La CAQ a choisi la brièveté. Un seul mot. Un verbe. À l’impératif. À la première personne du pluriel. C’est comme un cri de ralliement lancé autant aux Québécoises et aux Québécois qu’aux membres de la formation politique. Ce slogan témoigne de la confiance de la CAQ qui n’exprime aucune remise en question. Ce sera comme c’était, et tant pis pour celles et ceux qui y verraient de l’arrogance. Le risque de l’emploi d’un verbe transitif comme seul mot est que les adversaires vont lui trouver un complément. Continuons… à ne pas faire ceci ou à ne pas faire cela. C’est déjà commencé.
Parti libéral du Québec (PLQ), 27 députés.
Votez vrai, vrais enjeux, vraies solutions
Le PLQ a aussi retenu une formule à l’impératif. Mais à la deuxième personne du pluriel. Le PLQ s’adresse directement aux Québécoises et aux Québécois. Il les interpelle, soulignant d’emblée l’importance du geste : votez. Mais surtout, votez vrai. La combinaison est à la fois un appel et une critique du gouvernement, qui serait ainsi passé à côté des enjeux véritables. Ce slogan vise à rappeler la crédibilité d’un parti qui sait gouverner pour l’avoir fait longtemps.
Québec solidaire (QS), 10 députés
Changer d’ère
QS s’est donné un slogan poétique. L’énoncé est à double, voire à triple sens. Changer d’époque, mais aussi, phonétiquement, changer d’air, faisant écho tout autant à la qualité de l’environnement qu’à la qualité de notre vie démocratique. On notera que le verbe est à l’infinitif et non à l’impératif. QS ne dit pas Changez d’ère, mais Changer d’ère. Ce n’est pas un cri ou un appel. C’est une évocation, une aspiration, presque un songe. Ce slogan suppose une bonne maîtrise de la langue française pour en saisir tout le sens.
Parti québécois (PQ), 7 députés
Le Québec qui s’assume. Pour vrai.
Le PQ a une proposition en deux temps. La structure est indirecte avec l’emploi du pronom relatif «qui». L’énoncé est à la troisième personne du singulier. Il s’agit donc d’une description. On parle du Québec, plutôt que de parler aux Québécoises et aux Québécois. Ce Québec, on voudrait qu’il s’assume, et l’accentuation «pour vrai», arrivant ensuite, évoque l’indépendance comme une clé de voûte. Ce slogan énonce une vision et suggère une responsabilité collective.
Parti conservateur du Québec (PCQ), 1 député
Libres chez nous
Le slogan du PCQ est le seul à ne comporter aucun verbe. Il n’en a pas besoin. Le parti a voulu marquer les esprits en paraphrasant le mythique Maîtres chez nous de la campagne libérale de 1962. L’énoncé est certes accrocheur. Toutefois, ce parti qui consacre beaucoup d’efforts à dire qu’il est plus qu’un agglutinement de mécontents anti-masques a adopté un slogan qui l’y ramène constamment. Au-delà du coup marketing, sous-entendre que les Québécois ne sont pas libres reste, pour beaucoup, une exagération caricaturale.
Les slogans 2022 sont intéressants. Ils ont tous une histoire à raconter et donnent le ton à une élection qui se présente comme une course au meilleur deuxième.