Prévenir les crises, plutôt que les créer
08 décembre 2020
Controverse de l’Association des libraires du Québec
La controverse dans laquelle a été plongée l’Association des libraires du Québec (ALQ), la semaine dernière, nous rappelle les risques des médias sociaux pour la réputation d’une organisation.
Devant une série de commentaires négatifs suscités par les recommandations littéraires du premier ministre François Legault, publiées sur sa page Facebook, l’ALQ a réagi promptement en supprimant ladite publication. Le geste a entraîné une pluie de critiques, à gauche comme à droite, tous dénonçant en chœur cette nouvelle forme de « censure ». Bref, pour reprendre les mots d’Isabelle Hachey dans sa chronique de La Presse+ (1er décembre), « en espérant calmer le vent de colère qui soufflait sur les médias sociaux, l’ALQ n’aura réussi qu’à récolter la tempête. »
En vérité, l’ALQ n’est ni la première ni la dernière organisation à être plongée bien malgré elle dans une telle controverse, à une ère où la polarisation des échanges et le ton acerbe des commentaires vont grandissant sur les médias sociaux. Personne n’est vraiment à l’abri et les organisations doivent s’outiller pour prévenir en amont ce genre de situations. À cet égard, des bonnes pratiques existent. Voici la base.
1. Se doter d'une politique de gestion des médias sociaux claire et l'appliquer
On ne supprime pas une publication ou un commentaire d’un internaute pour le plaisir ou un motif arbitraire. Les organisations crédibles ont avantage à se doter d’une politique claire de gestion de leurs médias sociaux qui encadre ce genre de décision. Ils ont surtout intérêt à communiquer d’avance ces principes aux internautes afin d’appuyer toutes décisions prises en ce sens. Par exemple: quand entend-on supprimer ou masquer des commentaires? Sur quelle base et quelles valeurs?
2. Déterminer son niveau de tolérance au risque
Les organisations n’ont pas toutes la même tolérance au risque lorsqu’il est question de gestion des médias sociaux. C’est tout à fait normal. L’important est d’être conscient de ses limites. À quel point sommes-nous à l’aise de générer des débats et des commentaires négatifs sur nos pages?
La réponse à cette question permettra de déterminer les sujets que nous sommes prêts à aborder, les personnalités avec lesquelles nous acceptons de nous associer et, aussi, le ton de nos publications. Par exemple, un ton humoristique ou passif-agressif peut être très payant en matière de gestion de communautés, mais il s'accompagne d’une certaine prise de risques.
3. Analyser les risques inhérents à une publication
Avant d’appuyer sur le bouton « publier », une organisation devrait toujours faire une analyse sommaire des risques. Si l’on s’associe à une personnalité publique reconnue pour susciter de vifs débats, il faut s’attendre à composer avec ses partisans et ses adversaires. Dans la même veine, le risque ne sera pas le même si on partage une recette de tarte aux pommes que si on s’aventure à commenter la pandémie de COVID-19.
Lorsque cette analyse révèle un risque de controverse, une organisation devrait prévoir des messages et des réponses pour rappeler sa position et encourager un débat respectueux, en plus d’assurer un suivi plus serré des commentaires sous une publication. Une telle préparation évite d’être pris au dépourvu et de devoir improviser une réaction.
4. Prendre un pas de recul et garder la tête froide
Lorsque nos médias sociaux sont pris d’assaut par une poignée d’internautes furieux, on a tendance à réagir avec émotion et à accorder une importance démesurée à certains commentaires négatifs. Or, il vaut mieux garder la tête froide et se poser une série de questions-clés.
Les critiques formulées sont-elles le juste reflet de ce que pense la population, ou l’affaire d’un groupe isolé de militants? Sur le fond, les critiques sont-elles justifiées? A-t-on réellement commis une faute, au regard des valeurs qui guident habituellement notre organisation? Suivant ces valeurs, quelle réponse doit-on donner à ces commentaires?